Modèle d’attribution : cap vers le data-driven

Comment des modèles d’attribution intelligents vont-ils permettre d’affiner la connaissance des parcours clients et d’individualiser les décisions marketing ? Le marketing data-driven apporte une réponse à cette question en développant de nouveaux modèles d’attribution. Les enjeux de ce nouveau paradigme sont avant tout business, mais ils ne pourront être relevés qu’avec une meilleure maîtrise de la donnée et une mise à niveau des algorithmes d’attribution.
Selon une étude réalisée par IBM[1] la performance globale sur les investissements marketing augmente de 25 à 50% grâce au passage d’un modèle d’attribution classique à un modèle data-driven.
Dans cet article, les deux premières parties traitent des enjeux business et les deux dernières offrent un éclairage technique sur les différentes approches.
1. Dépasser la vision “dernier clic”
Chaque parcours client est unique, il est constitué de tous les points de contact en amont de la réalisation de l’objectif: recherche Google, bannière sur un site, réseaux sociaux, article de blog…
D’après une étude Criteo[2], presque 80% des annonceurs utilisent encore le modèle du dernier clic. Dans l’exemple de parcours client ci-dessous, on distingue plusieurs modèles d’attribution classiques qui vont chacun donner une contribution différente de chaque point de contact dans la vente. Par exemple, la Newsletter serait créditée de 100% de la vente dans un modèle “dernier clic”:

À partir d’un modèle d’attribution découle une vision de la performance. Aujourd’hui, de nombreuses décisions sont prises basées sur des KPI construits autour de modèles d’attribution simples (Dernier clic, …). Or, ces modèles ne rendent pas compte de la complexité des parcours clients. Une vision data-driven reflète cette complexité et apporte une meilleure compréhension au moment de la prise de décision.
Nos travaux de recherche chez Quantmetry traitent de l’attribution data-driven. Grâce à des algorithmes qui vont analyser de gigantesques jeux de données, on va pouvoir expliquer la contribution de chaque point de contact dans la réalisation d’un objectif. C’est un modèle dit bottom-up qui utilise l’historique de tous les visiteurs (points de contact et données CRM) et donne ainsi une attribution data-driven. L’algorithme va analyser les séquences, le nombre, la typologie des points de contacts…
L’analyse au dernier clic a tendance à valoriser les leviers payants au détriment des leviers branding qui interviennent plus tôt dans le parcours client. Dans un contexte où les leviers payants coûtent de plus en plus cher, il devient crucial de valoriser l’ensemble des points de contact et comprendre la contribution de chacun d’eux dans la vente. En commençant par des KPI plus justes et une meilleure compréhension des parcours clients, l’attribution data-driven se révèle un indicateur précieux pour de l’optimisation opérationnelle, à savoir comment allouer ses ressources.
De plus, l’industrialisation de ces algorithmes ouvre des perspectives sur des actions en temps réels comme par exemple:
-
Identifier les clients pour qui l’envoi d’un type de newsletter à un moment donné aura un fort impact sur leur probabilité de conversion.
-
Mettre à jour le ciblage des leviers payants pour augmenter ou arrêter la pression publicitaire.
-
Personnaliser le site en fonction du parcours client en amont.
Le défi de l’automatisation ne peut se faire sans une bonne compréhension de l’impact de chaque point de contact pour individualiser au plus juste les décisions marketing.
2. Les étapes dans la mise en place d’une stratégie d’attribution data-driven
A. Évaluer son degré de maturité sur la data
Pour que l’algorithme soit performant, il est important d’avoir de nombreuses données et de bonne qualité. Nous réalisons un audit pour comprendre la structure des données en évaluant par exemple:
-
La centralisation de la donnée: CRM, Data Management Plateform (DMP), partenaires médias (Adwords, Criteo, …), …
-
La granularité de la donnée à savoir le niveau de précision disponible. Par exemple, pour un point de contact SEA : Adwords > Campagne > Annonce > Mot-clé
-
La distribution des données pour s’assurer de la pertinence de la segmentation. Par exemple, mieux comprendre les mécanismes de conversion en étudiant la distribution du temps entre le premier point de contact et l’achat.
-
Le nombre moyen de points de contact avant achat
-
Les comportements non-acheteurs pour mieux cerner les mécanismes de conversion.
-
L’intégration des données avec les systèmes de pilotage (Bid Management System, Ad servers, Ad viewability measurement…).
B. Définir un objectif commun
L’enjeu est de réconcilier les visions au sein des différentes business-units pour casser les silos de données, c’est une mission de conduite du changement. L’idée est d’évaluer la performance globale plutôt que chaque point de contact de manière indépendante. Un autre bénéfice peut être dans l’évaluation des parcours clients. Par exemple, l’étude des séquences entre les différents points de contact va permettre d’identifier et/ou de valider les parcours les plus performants sur les phases d’acquisition, de conversion et de fidélisation.
C. Établir la feuille de route du Proof Of Concept jusqu’à son industrialisation
Nous travaillons du Proof of Concept à la mise en production d’algorithmes d’attribution data-driven. Notre méthodologie est de suivre une démarche itérative pour perfectionner le modèle en capitalisant sur l’expertise métier. Afin d’affiner l’analyse nous ajoutons des paramètres comme:
-
Segmentation client
-
Coût des campagnes
-
Devices: mobile, tablette et desktop
-
Critères géographiques (pays, villes) et de temporalité (matin, après-midi, soir)
-
Saisonnalité: opération commercial, lancement nouveau produit, …
-
Story-telling: s’assurer du bon message tout au long des points de contact
En support du développement du modèle algorithmique, nous accompagnons la conduite du changement:
-
Par une interface sur mesure à destination des métiers et opérationnels afin de faciliter l’accès à une information pertinente pour leurs cas d’usage.
-
Par l’automatisation de certaines actions marketing, par exemple le déclenchement d’un mail automatique aux visiteurs les plus appétants.
D. Mesurer le succès
En combinant 3 approches, nous pouvons évaluer la pertinence et le ROI des modèles data-driven:
L’A/B testing permet de valider en permanence la pertinence du modèle et mieux se rendre compte de son impact réel. Nous recommandons cette approche pour comparer les performances de plusieurs modèles (classiques vs. data-driven).
L’effet marginal, qui donne l’impact d’1€ investi en chiffre d’affaire, est utilisé pour simuler des prises de décisions sur les différents modèles. Ainsi, nous pouvons évaluer le ROI et donner des indicateurs précieux aux directions marketing pour ventiler au mieux leur budget média.
Le calcul de l’uplift nous permet aussi d’évaluer le modèle; il permet d’extraire la sensibilité d’un client à un levier en particulier. Ainsi, nous vérifions la contribution réelle de chaque point de contact.
3. Comment juger la performance d’un modèle d’attribution ?
Nous retenons 5 axes qui permettent de déterminer la pertinence d’un modèle.
A. Précision de la prédiction : le but de cet axe est de déterminer si l’algorithme est juste et précis dans les prédictions qu’il donne. Autrement dit, est-ce que l’algorithme est pertinent dans l’attribution qu’il associe à chaque canal. Il existe ici de nombreuses métriques bien connues des data scientists, incluant par exemple l’aire sous la courbe ROC. En fonction des applications d’autres indicateurs comme les mesures de lift ou la courbe de precision-recall peuvent être utilisés.
B. Robustesse : Il est capital de construire un modèle qui soit stable dans le temps. Par principe, un modèle d’attribution n’est pas à usage unique et doit donc pouvoir encaisser les mouvements et transformations temporelles. Les métriques de robustesse peuvent être calculées en utilisant différentes photographies datées des données et en étudiant les variations de précision entre ces photographies. Un autre aspect de la robustesse est la reproductibilité du modèle, c’est-à-dire sa capacité a être réutilisé dans des contextes variés.
